vendredi 26 mars 2010

Suggestion de lecture

À lire, un article assez intéressant de Christianity Today sur l'Annonciation. Pas autant intéressant pour la suggestion de récupérer la fête pour le "combat contre l'avortement" que pour les réflexions sur le mouvement évangélique, notamment les tentatives d'expliquer pourquoi les évangéliques ignorent largement cette fête et le calendrier liturgique en général. Une des observations plutôt "coup de gueule" : "There is, especially in American evangelicalism, a huge emphasis on pragmatic Christianity: saving souls, getting stuff done. Jesus, in his ministry, was getting stuff done. He wasn't just laying there in a womb or a manger. For Catholics and Orthodox, however, the salvation that evangelicals preach more fervently depends on the lowliness of the Christ and his incarnation. Hence, the different emphases." (L'évangélisme, notamment étatsunien, met l'accent sur un christianisme pragmatique : sauver des âmes, accomplir des choses. Jésus, durant son ministère, a accompli des choses. Il ne faisait pas que se prélasser dans un utérus ou une mangeoire. Pour les catholiques et les orthodoxes cependant, le salut, prêché par les évangéliques avec ferveur, dépend de l'humilité du Christ et de son Incarnation. Ce qui explique que l'on accentue différentes choses).

mardi 9 mars 2010

La mondialisation

Je lis cette semaine Claude Lévi-Strauss (Tristes tropiques, un livre sur ma liste depuis au moins 15 ans mais que je ne commence que maintenant). Il écrit sur la modernité et la "mondialisation" telle qu'il l'a perçoit dans la 1ère moitié du 20e siècle, comme un rouleau compresseur des cultures : "Je comprends alors la passion, la folie, la duperie des récits de voyage. Ils apportent l'illusion de ce qui n'existe plus et qui devrait être encore, pour que nous échappions à l'accablante évidence que vingt mille ans d'histoire sont joués. Il n'y a plus rien à faire : la civilisation n'est plus cette fleur fragile qu'on préservait, qu'on développait à grand-peine dans quelques coins abrités d'un terroir riche en espèces rustiques, menaçantes sans doute par leur vivacité, mais qui permettaient aussi de varier et de revigorer les semis. L'humanité s'installe dans la monoculture; elle s'apprête à produire la civilisation en masse, comme la betterave. Son ordinaire ne comportera plus que ce plat (...) Car ces primitifs à qui il suffit de rendre visite pour en revenir sanctifié, ces cimes glacées, ces grottes et ces forêts profondes, temples de hautes et profitables révélations, ce sont, à des titres divers, les ennemis d'une société qui se joue à elle-même la comédie de les anoblir au moment où elle achève de les supprimer, mais qui n'éprouvait pour eux qu'effroi et dégoût quand ils étaient des adversaires véritables. Pauvre gibier pris aux pièges de la civilisation mécanique, sauvages de la forêt amazonienne, tendres et impuissantes victimes, je peux me résigner à comprendre le destin qui vous anéantit, mais non point être dupe de cette sorcellerie plus chétive que la vôtre, qui brandit devant un public avide des albums en kodachrome remplaçant vos masques détruits. Croit-il par leur intermédiaire réussir à s'approprier vos charmes ? Non satisfait encore ni même conscient de vous abolir, il lui faut rassasier fiévreusement de vos ombres le cannibalisme nostalgique d'une histoire à laquelle vous avez déjà succombé".