dimanche 20 janvier 2008

Des lectures anabaptistes

Que ce soit à cause de votre intelligence fulgurante ou simplement parce que vous avez lu le titre ou quelques entrées ou liens de mon blog, vous savez que je m'inscris dans la tradition anabaptiste. Si vous voulez lire davantage sur différents sujets touchant à cette tradition, je vous suggère de consulter la liste de publications (en français) à l'adresse suivante (que vous trouverez aussi grâce au lien Publications anabaptistes dans la liste Mes liens).

www.centre-mennonite.fr/catalogue/publications.php

Évidemment, de nombreux ouvrages ont été publiés sur l'anabaptisme ou sur différents sujets traités dans une perspective anabaptiste, surtout en anglais, mais ces livres récents en français sont un excellent point de départ. Je vous les recommande tous, et plus particulièrement Eschatologie et vie quotidienne, Agir, travailler, militer, Miroir des martyrs et Michaël Sattler. Les deux derniers sont davantage des ouvrages touchant à l'histoire anabaptiste, les deux premiers à une théologie anabaptiste contemporaine.

Exigez-les (gentiment) de votre libraire.

mardi 15 janvier 2008

Une illustration de l'importance de l'herméneutique

Je vous invite à lire l'article suivant qui illustre de façon très concrète les dangers d'une lecture fondamentaliste de la Bible qui ne tient aucunement compte de l'intention des auteurs bibliques ou de leur contexte historique. C'est aussi une compréhension erronée du phénomène prophétique (j'y reviendrai dans un avenir rapproché). Comme quoi faire de l'herméneutique (réfléchir à la façon d'interpréter, notamment les textes bibliques), contrairement à ce que certains pensent, n'est pas une entreprise purement abstraite sans conséquence sur la "vraie" vie (comme s'il y avait une fausse vie).

http://www.motherjones.com/news/feature/2008/01/let-there-be-light-crude.html

Merci à Éric Wingender d'avoir attiré mon attention sur cet article.

mercredi 9 janvier 2008

La patience comme vertu

Je suis de retour après quelques semaines de silence. J'espère que cela vous a donné le temps de lire les entrées archivées :).

Le temps des fêtes passé, période où nous avons été encouragés à dépenser et à offrir à nous-mêmes et aux autres ce que notre âme désire, j'aimerais aborder le sujet de la patience. On le sait, nous vivons à une époque de gratification immédiate, où la patience n'est pas souvent cultivée. Malheureusement, la patience, bien que hautement valorisée par les chrétiens depuis les origines (Ga 5,22), n'est plus très souvent cultivée dans l'Église.

La construction de l'Église, notamment en territoire postchrétien (ou préchrétien), est un travail à long terme. Or, l'identité évangélique s'est construite en partie à travers le revivalisme, avec les réveils des 18e et 19e siècles, notamment aux États-Unis et en Grande-Bretagne. Bien qu'à l'origine le revivalisme n'était pas opposé à la patience et au travail de longue haleine (notamment la réflexion et la formation académique et théologique), à la longue le revivalisme s'est appauvri et n'a souvent conservé que ses dimensions émotives, instantanées, passives (où "remettre cela entre les mains de Dieu" veut dire "attendre sans rien faire"). Cela n'a pas disposé les évangéliques au travail long et ardu accompli dans la patience. Or, il semble bien que dans la vie, la plupart des choses les plus importantes demandent des efforts. L'histoire d'Israël puis de l'Église illustre également les efforts considérables qui ont dûs être déployés par des générations de prophètes, prêtres, pasteurs, missionnaires, évangélistes et autres ouvriers et laïcs pour arriver à des résultats un tant soit peu signifiants. Il y a pourtant un décalage entre ce constat, que l'on peut tirer de l'histoire, et le discours de nombreux évangéliques. Combien de fois avons-nous entendu des conférenciers ou prédicateurs annoncer un réveil imminent qui allait, une fois pour toutes, permettre la conversion des masses et transformer la nation ? "Oubliez tout ce que vous avez accompli en 30 ans d'efforts : c'est dans les 2-3 années de réveil (qu'on dit imminent) que tout se jouera !" Une invitation à s'asseoir pour voir ce qui va se passer (Jon 4,5).

Je vois immédiatement au moins 3 problèmes majeurs avec cette attitude :

1) en affirmant cela, nous imposons à Dieu un mode d'action particulier (Dieu agit seulement dans les réveils) sans reconnaître ce que Dieu fait déjà au milieu de nous (Dieu n'a-t-il rien fait ces 30 dernières années ?). C'est sans compter les 3000 ans d'action de Dieu dans l'histoire d'Israël et de l'Église qui semblent aussi illustrer un autre mode d'action de Dieu.
2) la réalité ne réussit jamais à "rattraper" nos prédictions : on nous annonce un réveil au Québec depuis 30 ans. Où est-il donc ?
3) en adoptant cette attitude passive d'attente, nous ne travaillons pas sur ce qui est le plus important, soit aider les nouveaux croyants (et être prêt à aider les futurs croyants d'éventuels réveils) à devenir des disciples de Christ Jésus, notamment en développant notre théologie, notre pensée (soit la pensée chrétienne sur le monde et ses problèmes, sur les sciences, la littérature, la culture, les arts, l'organisation sociale, la civilisation, etc.), notre éthique, notre vie d'église. N'ayant pas fait le travail de réflexion, on ne peut évidemment communiquer de telles réflexions aux croyants qui se joignent à nous. Pire encore, nous ne préparons pas la génération qui monte dans nos églises pour qu'elle puisse diriger l'Église et avoir un impact dans les milieux dans lesquels elle est et sera appelée à servir Dieu.

La négligence des jeunes, notamment en les laissant à eux-mêmes quand vient le temps d'acquérir une formation et de faire le pont entre cette formation et leur foi, conduit à d'horribles résultats. La première tragédie est que certains abandonnent la foi ou du moins l'Église, incapables d'y voir une réalité compatible avec la raison ou la science qu'ils apprennent à apprécier. La seconde est que ceux qui persévèrent dans la foi sont souvent appelés à vivre une forme de schizophrénie entre leur vie intellectuelle, nourrie par leurs études et leurs lectures, et leur vie spirituelle, nourrie uniquement par les expériences et sentiments vécus à l'Église. Cela résulte dans le fait que la plupart des idées que ces chrétiens ont au sujet de l'environnement, de la société, de la justice sociale ou de l'univers dérivent uniquement de ce qu'ils lisent ou apprennent à l'extérieur de l'Église. Les évangéliques qui recyclent et compostent le font-ils parce qu'ils ont été sensibilisés à l'église ? Je n'en connais pas un seul pour qui c'est le cas. Les évangéliques prennent (parfois) soin de l'environnement parce que les médias en parlent. Or, il y aurait bien une ou deux choses à dire d'un point de vue chrétien sur l'environnement qui aurait à voir par exemple à l'importance de respecter et de prendre soin de la création de Dieu.

Préparer une génération à suivre Dieu et à être transformée dans sa pensée et sa pratique demande un investissement majeur de temps et d'efforts. Ce sont malheureusement des efforts que peu de gens sont prêts à investir. Évidemment, on ne peut pas donner ce qu'on n'a pas. Il faut commencer par faire la réflexion soi-même si on veut espérer guider les autres dans leur propre réflexion.

À ceux qui attendent le réveil, je terminerais simplement en suggérant que le Québec a déjà connu un réveil. Le problème est que nous avons laissé les nouveaux croyants largement sans direction et sans formation, avec les résultats que l'on connaît : certains ont quitté, mais surtout, le réveil s'est essoufflé puisqu'il n'avait pas de profondeur. On pourrait faire le parallèle avec la Parabole du semeur (Mt 13 // Mc 4 // Lc 8), où la semence tombée dans les endroits pierreux sans beaucoup de terre lève vite mais sèche, n'ayant pas de racines. Faudrait y mettre un peu de compost.

Je vous laisse avec de la lecture fort intéressante si vous voulez lire des anecdotes historiques sur le mouvement anabaptiste. Merci à Neal Blough, directeur du Centre mennonite de Paris, qui m'a dirigé vers ce site.
http://rubensaillens.over-blog.org/article-14895925.html