mardi 18 mars 2008

Il est vivant !

Le Christ est ressuscité !

La résurrection du Christ est sa victoire sur la mort et le péché. Sans la résurrection du Christ, par exemple si la croix (pourtant si centrale pour les évangéliques) n'est pas suivie de la résurrection, le chrétien ne peut espérer en sa propre résurrection. Et comme ce que nous croyons concernant l'après-vie a évidemment un impact sur notre vie sur Terre, la résurrection du Christ est la clé de voûte de la religion chrétienne. Le problème est que l'on comprend (ou du moins je comprends) si peu ce qu'est, au juste, la résurrection, même la seule qui a eu lieu (c'est du moins ce que nous croyons), soit celle du Christ. Aussitôt que nous tentons de dire autre chose que "il est vivant", nous sommes confrontés au mystère, à l'insondable. La résurrection du Christ n'est évidemment pas une simple réanimation physique. Elle n'est pas non plus une simple métaphore, une résurrection "spirituelle". La résurrection doit être corporelle pour avoir un réel sens (et pour être source d'espérance pour le chrétien, voir 1 Co 15), mais de quel corps s'agit-il ? De quel étrange phénomène est-il question ? Ceux qui comprennent la résurrection comme une réanimation purement physique objectent évidemment : "comment peut-il y avoir résurrection si nos molécules sont détruites après notre mort pour devenir une partie des arbres ou de l'oeil du beau-frère qui a mangé les choux qui ont poussé dans la terre nourrie par nos cadavres?"

Mais justement, la résurrection du Christ dans la compréhension chrétienne n'est CERTAINEMENT PAS une simple réanimation physique (ou reconstitution des molécules originelles). Les Évangiles évoquent le changement radical dans la nature du corps du Christ ressuscité, anomalie de la nature, et pourtant accomplissement parfait de la nature et de la vie. Le Ressuscité est plus vivant que tout être (corporel) vivant avant lui. Les Évangiles n'osent pas tenter d'expliquer le processus. Ils constatent que le Galiléen est de nouveau vivant. Confrontés aux apparitions déconcertantes du Ressuscité, le constat est donné, sans qu'on prétende comprendre la mécanique de la chose. Pour paraphraser Galilée : "Et pourtant, il est vivant !" Affirmer que le Christ est vivant, ce n'est pas pour autant savoir exactement comment une telle chose est possible.

Donc, l'altérité du corps du Ressuscité est radicale, mais sa corporalité n'en est pas moins évidente. De quel corps s'agit-il donc ? Et quel est le lien entre ce corps ressuscité et l'Église ? L'Église est, après tout, aussi décrite comme le corps du Christ. Quel est donc le lien, au juste, entre ce corps ressuscité et l'Église ? Une solution à ce mystère consiste à adopter une conception sacramentelle de la résurrection, qui ne nie nullement l'aspect corporel de celle-ci, mais insiste sur l'idée qu'on accède au Ressuscité par l'entremise de son corps, l'Église. C'est ce que plusieurs spécialistes de Jean perçoivent dans cet Évangile, dont Sandra M. Schneiders, que j'ai eu la joie d'entendre lors d'un passage à Montréal l'an dernier (elle a écrit abondamment sur Jean, si ces quelques lignes inspirées en partie par elle vous titillent). L'accès au Ressuscité pour le croyant se fait dans Jean notamment par l'entremise de la communauté de foi et par la participation à la célébration de la Cène. L'accès au Ressuscité ET l'espérance en la résurrection sont en effet liés en Jean à la célébration de la Cène, dont le récit est absent à la fin de Jean et est transposé aux côtés du miracle des 5000 hommes nourris par Jésus (Jn 6). Comme cela arrive souvent dans Jean, le sens du récit en est par conséquent transformé et approfondi. Plus je lis Jn 6 (et plus je lis Jean), plus j'ai l'impression de faire face à un océan dont la profondeur me donne le vertige et me réconforte à la fois.

Avez-vous compris quelque chose à mes élucubrations ? Je ne suis pas sûr d'avoir compris moi-même (je ne suis, après tout, qu'un bibliste de l'Ancien Testament). Mais je sais une chose... "Il est vivant !"

2 commentaires:

Dominic Perugino a dit...

Hmmmm, non, je ne suis pas certain de comprendre, mais moi aussi tu réussis à me donner un vertige à la fois réconfortant. Je crois que je n'ai jamais réfléchis à cette question. Pour moi, c'est comme si le rôle du saint-esprit était justement de nous mettre en relation avec la trinité. Mais il est vrai que dans mon cas cela c'est fait par l'entremise du corps, c'est-à-dire l'Église.

Belle réflexion!

Marc Paré a dit...

Merci Dominic pour ce commentaire. Je pense qu'il illlustre la tension que nous ressentons parfois dans ce domaine entre notre théologie et notre pratique. Cela doit vouloir dire qu'il faut réfléchir d'avantage pour éclaircir notre théologie (ou notre pratique !). Pas facile, la vie chrétienne réfléchie, mais c'est stimulant.